C’est un phénomène longtemps cantonné à la théorie, aux confins du monde quantique.
ÉCRIT PAR : SAHBY MEHALLA

Mais aujourd’hui, les chercheurs du Massachusetts Institute of Technology (MIT) l’ont capté, mesuré, prouvé : le “second son” existe. Un mode de propagation de la chaleur qui ne ressemble en rien à ce que nous connaissons dans notre quotidien – une chaleur qui ne se diffuse pas au hasard, mais se déplace comme une onde sonore.
Une découverte aux frontières de la physique
La scène s’est jouée à une température proche du zéro absolu. Dans un gaz quantique superfluide constitué d’atomes de lithium-6, les scientifiques ont observé quelque chose d’unique : des oscillations thermiques ordonnées, semblables à des vagues, traversant le fluide à une vitesse mesurable. Un exploit rendu possible grâce à une thermographie par fréquence radio, capable de détecter le mouvement de la chaleur avec une précision inédite.
Ce comportement, appelé “second son”, avait été théorisé dès les années 1940 par le physicien soviétique Lev Landau, dans le cadre des travaux sur l’hélium II. Mais jusqu’à aujourd’hui, les preuves directes restaient hors de portée. Grâce à cette avancée du MIT, le phénomène sort du domaine spéculatif pour entrer dans le champ du mesurable.
“C’est la première fois que nous voyons la chaleur se déplacer de manière cohérente, comme une onde dans l’eau. C’est fondamentalement différent de ce que nous observons dans les matériaux ordinaires,” explique Martin Zwierlein, professeur de physique au MIT, cité par le MIT News.
Des implications technologiques majeures
Outre sa beauté conceptuelle, le “second son” pourrait révolutionner notre manière de penser les transferts d’énergie. Dans les matériaux supraconducteurs, dans les cristaux quantiques ou encore dans les étoiles à neutrons, cette onde thermique ouvre de nouvelles perspectives : meilleure gestion du refroidissement, détection ultra-sensible des variations thermiques, et pourquoi pas, demain, de nouveaux dispositifs de transport d’énergie sans perte.
Pour que ce phénomène se produise, des conditions extrêmes sont nécessaires : des températures inférieures à 2 kelvins et un environnement superfluide. Cela limite, pour l’instant, son application pratique directe. Mais comme souvent en physique fondamentale, les révolutions commencent dans les laboratoires avant de changer nos vies.
Une chaleur qui fait du bruit
D’un point de vue poétique, on pourrait dire que le “second son” donne une voix à la chaleur. Ce qui était autrefois silencieux, diffus, invisible, devient oscillant, vibrant, presque musical. Grâce à la physique quantique et aux outils du XXIe siècle, nous découvrons que même la chaleur peut chanter — à condition d’écouter assez bas, et assez froid.
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