EN VIDÉO - Thaïlande : des Israéliens agressés, mais le malaise va bien au-delà des coups

Bangkok, Koh Phangan, Phuket… Depuis plusieurs semaines, des vidéos circulent, des témoignages s’accumulent, des regards se durcissent : des touristes israéliens sont victimes d’agressions, de rejet, de colère. 

Et ce qui pourrait sembler n’être que des incidents isolés révèle un malaise bien plus profond, ancré dans les cicatrices ouvertes par la guerre à Gaza.

En mars, deux Israéliens en vacances à Phuket ont été roués de coups par un groupe de personnes transgenres après une altercation sur Bangla Road, haut lieu touristique nocturne. À Koh Phangan, une touriste israélienne a provoqué un tollé en refusant de retirer ses chaussures dans un établissement, lançant : « Mon argent construit votre pays ». Et à Pai, une petite ville prisée des backpackers, les habitants ont dénoncé des comportements "inacceptables" de certains groupes de touristes israéliens, accusés de vandalisme et d’irrespect flagrant des règles locales. Certains ont été expulsés manu militari.

Mais au fond, que se passe-t-il ?

Les tensions en Thaïlande à l’égard des Israéliens ne naissent pas d’un vide. Elles s’inscrivent dans une réaction globale, spontanée, parfois brute, à la violence de la guerre en cours. Gaza n’est pas qu’un conflit lointain : c’est une fracture morale qui résonne jusque dans les ruelles de Chiang Mai ou sur les plages de Koh Tao. Les images d’enfants tués, de familles décimées, circulent partout — et certains, ici, n’acceptent plus l’indifférence, ni les provocations perçues comme telles.

Certains touristes israéliens deviennent alors, à tort ou à raison, les représentants visibles d’un État en guerre. Et quand l’un d’eux crie dans un café que "son argent a construit le pays", il réveille des siècles de domination coloniale, des mémoires de peuples méprisés. La réponse est brutale, violente, parfois injuste, mais elle n’est pas incompréhensible.

Il ne s’agit pas ici de justifier les agressions. Mais de dire qu’il existe aujourd’hui, en Thaïlande comme ailleurs, une colère qui déborde. Une exaspération face à ceux qui voyagent sans voir, consomment sans comprendre, parlent sans écouter. La Thaïlande, terre d’accueil légendaire, n’est pas un décor muet. Et les silences diplomatiques sur Gaza laissent des vacuums que le réel se charge de remplir, parfois avec fracas.

L’ambassade d’Israël appelle ses ressortissants au calme, à la prudence, au respect. Mais peut-on vraiment apaiser une tension sans affronter ses causes ? Peut-on voyager en paix lorsque son pays est en guerre ? Ce sont les questions brûlantes qu’emportent aujourd’hui les valises des touristes israéliens — qu’ils le veuillent ou non.

@radiosiskofm